En utilisant un nouveau traitement, des chercheurs canadiens ont réussi à stopper la sclérose en plaques chez 23 patients ayant un mauvais pronostic. Si les résultats sont encourageants, le protocole de traitement est néanmoins très agressif et risqué car il comporte la destruction totale du système immunitaire suivie d’une autogreffe de cellules souches  hématopoïétiques.
Sur les 314 IRM réalisés durant la période de suivi, ont été constatés chez tous les patients une régression très importante des lésions et l’absence de nouvelles lésions.
La sclérose en plaques est caractérisée par la destruction progressive de l'enveloppe protectrice (la myéline) des nerfs du cerveau et de la moelle épinière, ce qui provoque des lésions du système nerveux : les plaques de démyélinisation. Ces lésions sont disséminées dans le cerveau, souvent la moelle épinière, et très souvent le nerf optique (qui relie l'oeil au cerveau), elles sont généralement de petite dimension, formant des plaques, d'où le nom de la maladie. La maladie évolue différemment mais est à l’origine de handicaps multiples. On estime que la sclérose en plaques touche 80 000 personnes en France et des millions dans le monde. Il s’agit de la maladie neurologique invalidante la plus fréquente chez les jeunes adultes. Dans la majorité des cas, les premiers symptômes apparaissent entre 20 et 40 ans.
Certains patients présentant des formes progressives et sévères sont traités par un traitement immunosuppresseur suivi d’une autogreffe de cellules souches hématopoïétiques . Ce type de traitement améliore l’état des patients et les lésions de la maladie mais cette amélioration n’est pas définitive et le traitement par d’autres médicaments est poursuivi.
Dans un article publiĂ© dans la revue The Lancet, une Ă©quipe canadienne rapporte les rĂ©sultats d’un traitement similaire Ă celui qui vient d’être citĂ© mais beaucoup plus radical. Dans cette Ă©tude de phase 2, rĂ©alisĂ© en ouvert et sans groupe comparateur, les chercheurs ont recrutĂ© 24 patients âgĂ©s de 18 Ă 50 ans atteints des formes progressives, Ă©voluĂ©s et de mauvais pronostic de la maladie. La durĂ©e moyenne de la maladie pour l’ensemble des patients Ă©tait de 6 Ă 7 ans. Après un prĂ©lèvement de cellules souches hĂ©matopoĂŻĂ©tiques autologues CD34, tous les patients ont reçu non pas un traitement immunosuppresseur  mais un traitement dĂ©truisant complètement leur système immunitaire. Ce traitement "immunodestructeur" consistait en l’administration de bisulfan , cyclophosphamide et globuline anti-thymocytes dĂ©rivĂ©e du lapin. L’avantage de ce traitement, prĂ©cisent les auteurs, est qu’il traverse la barrière hĂ©mato-encĂ©phalique  et donc atteint la totalitĂ© du système nerveux. Après cette destruction de l’immunitĂ© des patients, les investigateurs ont administrĂ© les cellules hĂ©matopoĂŻĂ©tiques autologues prĂ©alablement prĂ©levĂ©es et cela afin de "renouveler complètement" le système immunitaire, l’idĂ©e Ă©tant d’éliminer toute cellule produisant des auto-anticorps  contre la myĂ©line  et donc la rĂ©mission totale de la maladie sans besoin de traiter ultĂ©rieurement. Â
Sur les 24 patients ainsi traités, un est décédé de complications liées à la destruction de son système immunitaire, mais les 23 autres ont vu leur maladie régresser complètement. Ainsi, la maladie a été stoppée et cela pendant une longue période de suivi de 13 ans, sans nécessité d’aucun traitement. Pendant cette période, tous les patients ont vu leur état clinique s’améliorer considérablement, jusqu’à la quasi normalité et la reprise de leurs activités scolaires ou professionnelles. Aucune rechute n’a été observée et cela en l’absence de tout traitement. Sur les 314 IRM réalisés durant cette période, ont été constatés chez tous les patients une régression très importante des lésions et l’absence de nouvelles lésions tandis que chez 9 patients, les chercheurs ont constaté une diminution de l’atrophie cérébrale, qui est devenue identique à celle des personnes saines.
Selon le Pr Mark S Feedman, co-auteur de l’article, ces résultats doivent être interprétés avec précaution, d’une part car "il s’agit d’un petit échantillon de 24 patients sans groupe contrôle comparateur, ce qui veut dire que pour confirmer nos résultats, des études plus larges et avec un groupe contrôle sont nécessaires, et d’autre part, car il s’agit d’un traitement très agressif qui nécessite la vérification de la balance bénéfice-risque".
De son côté, le Dr Jan Dörr du Centre de Recherche NeuroCure à Berlin, Allemagne, a commenté : "Ces résultats sont impressionnants et semblent bien supérieurs à tous les autres traitements de la sclérose en plaques. Cependant, nous ne pouvons entrevoir son application dans le court terme en raison de ses risques très importants. Il faudra conduire des études pour améliorer la sécurité de ce procédé mais il faudra les faire dans des centres très spécialisés".